Follows a lionization of Øyvind Strømmen's La toile brune, followed in turn by broadsides against Richard L. Rubenstein's Jihad and Genocide and David Pryce-Jones's Betrayal (France, the Arabs, and the Jews) — which Camus uses to angrily denounce the Eurabia concept as "anti-French" — along with a litany of expressions, from "problematic", "polemical terms", and "abusive equivalence", to "fear", "plottism", "ethno-differentialism", and "Islamophobic Westernism", through "Western Europe's radical xenophobic right parties", their "obsession", and "their idol, Geert Wilders".
Griping about the terms Islamo-Fascism and Nazislamism, Camus is outraged that no distinction is made between differing totalitarianisms, such as Nazism and Communism — although he is quick to add "even though they might all be morally condemnable" (not "are morally condemnable", "might be").
The best part of the article is when Camus concludes that "this idea demeans the concept of European civilization as a skin-thick backlash at the Other, without proposing a coherent cultural project likely to define the values that Muslims in Europe would be required to integrate." The values that Muslims in Europe would be required to integrate are, simply, to follow the local laws and not try to impose the laws of their societies on us. How complicated is that to understand? How reprehensible, how racist, is that supposed to be?
L'idéologie qui a conduit Anders Behring Breivik à s'attaquer à l'Etat norvégien, puis à des militants du Parti social-démocrate, en juillet 2011, n'est pas que le délire d'un homme seul : c'est une construction intellectuelle qu'il explique dans son manifeste "2083" - une déclaration d'indépendance européenne, qui s'avère être surtout une compilation des écrits d'auteurs anglo-saxons appartenant à la frange la plus radicale du mouvement néoconservateur.L'enquête du journaliste norvégien Oyvind Strommen, La Toile brune (Actes Sud, 206 p., 21 euros), montre bien l'obsession qui s'est emparée depuis le début des années 2000 d'une partie significative des droites radicales xénophobes en Europe occidentale. Il s'agit de la peur d'Eurabia, néologisme forgé en 2006 par l'essayiste Bat Ye'Or, désignant un continent et une culture européens soumis de leur plein gré à l'islam et à son corpus de lois normatives, la charia, ayant renié leurs racines "judéo-chrétiennes" et de surcroît en voie d'être démographiquement submergés par les musulmans, au point que les Européens "de souche" deviendraient bientôt minoritaires.
Autre néologisme, la "dhimmitude" (le fait d'être soumis au statut de sujet protégé, donc de seconde zone, qu'impose l'islam aux non-musulmans) serait l'inéluctable horizon - et le choix conscient - des peuples de notre continent, si elle n'est déjà notre réalité quotidienne.… Il a été assez peu souligné qu'il s'agit aussi d'un concept antifrançais, comme le démontre le livre-réquisitoire du journaliste et historien David Pryce-Jones, Un siècle de trahison : la diplomatie française et les juifs, 1894-2007 (Denoël, 2008). Intitulé qui revient à faire porter au Quai d'Orsay et à trois Républiques successives le sceau d'infamie de l'antisémitisme ainsi qu'à présenter la France comme un allié non fiable, voire un adversaire, des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et de l'OTAN.
Dans les milieux qui tiennent Eurabia pour une réalité, c'est la France qui est désignée comme le principal instigateur de la politique de "capitulation" face à l'islam qui aurait débuté après le choc pétrolier de 1973. Ce qui lui est nié est rien moins que le droit d'avoir la politique de sa géographie et de son histoire avec le Maghreb, le Machrek et l'Afrique occidentale, ainsi que de préférer un monde multipolaire à un remake de la guerre froide dans lequel le "monde libre" devrait endiguer les assauts de l'islam.
… La question est de savoir si, comme la théorie d'Eurabia le suggère, on peut y arriver de manière crédible en utilisant un concept marqué par le complotisme, en niant la réalité de l'existence du peuple palestinien et en promouvant une politique de confrontation globale.Dans le langage des théoriciens d'Eurabia, le concept d'Occident remplace celui d'Europe. Preuve que, pour eux, notre continent ne doit se définir que par le lien transatlantique et non comme une Europe- puissance. L'idée d'Eurabia sert à justifier moralement le leadership mondial incontesté de l'Amérique, à la condition, bien sûr, que la politique étrangère des Etats-Unis ne soit pas celle du président Barack Obama mais de ses adversaires. Notamment de ceux qui accusent le chef de l'Etat américain de brader les intérêts d'Israël et qui veulent, depuis avant même le renforcement des sanctions internationales, en finir avec le régime de Téhéran par une intervention militaire.
Les mêmes polémistes accusent l'Europe d'abandonner ses juifs au nouvel antisémitisme des populations musulmanes issues de l'immigration, d'être hostile à l'existence d'Israël et de promettre les peuples israélien et juif à un nouveau génocide. Cette dernière hypothèse a été esquissée en 2010, dans son ouvrage Jihad and Genocide (Rowman & Littlefield), par le théologien de la Shoah Richard L. Rubenstein pour qui le "potentiel génocidaire" de l'idéologie djihadiste menace l'ensemble des non-musulmans.
Dans le monde manichéen d'Eurabia, le communisme a été remplacé par l'islam comme ennemi civilisationnel. Comme le communisme, il est un adversaire absolu d'autant plus redoutable qu'il est à la fois un ennemi extérieur (la menace Al-Qaida notamment) et un ennemi de l'intérieur. C'est sans doute ce dernier point qui a les conséquences politiques les plus graves pour la cohésion des sociétés européennes.
En effet, les partisans de la théorie d'Eurabia ont bien pour fixation l'islam et non l'islamisme. Ils considèrent que le premier est à la fois une culture et un projet politique, celui du califat mondial, et que le second n'est ni réformable ni susceptible d'être modéré. Cela revient à assigner à résidence les individus originaires du monde arabo-musulman dans une identité dont ils ne peuvent même pas se défaire par l'assimilation.
… On peut en tout cas remarquer que le Parti de la liberté néerlandais, comme naguère Pim Fortuyn et les populismes xénophobes scandinaves, a retourné contre l'islam les idées de la gauche émancipatrice des années 1970 : droits des femmes, des homosexuels, des minorités (les juifs notamment) menacés par la répression de la "déviance" que les islamistes au pouvoir mettent en oeuvre.
Le dernier problème théorique posé par la notion d'Eurabia est l'usage des termes "islamo-fascisme" voire "nazislamisme", le premier ayant été utilisé par George W. Bush lui-même. Il s'agit de termes polémiques, dénués de pertinence scientifique : le fascisme comme le nazisme sont des idéologies de l'homme nouveau et non du retour à un âge d'or ; ils positivent la modernité (les néofascistes italiens de CasaPound se réclament du turbofascisme) et non le fixisme ; ils ont le culte de l'Etat total, là où l'islamisme s'accommode très bien du libéralisme économique et de l'Etat faible voire, dans sa variante radicale, évacue totalement l'impératif de l'Etat.
Cette mise en équivalence abusive, tout comme d'ailleurs celle qui assimile communisme et fascisme, interdit de penser le totalitarisme selon des catégories différentes en nature, quand bien même elles seraient toutes moralement condamnables.… L'occidentalisme islamophobe des tenants d'Eurabia est une impasse. C'est en premier lieu un mythe incapacitant : si l'islamisation de l'Europe est déjà advenue, si les peuples européens sont minoritaires sur leur continent, s'ils n'ont plus de conscience historique et politique, à quoi sert de lutter pour une civilisation déjà morte ? Penser Eurabia est une posture décliniste et démobilisatrice.
Ensuite, cette idée rabaisse le concept de civilisation européenne au niveau d'une réaction de rejet épidermique de l'Autre, sans proposer de projet culturel cohérent susceptible de définir les valeurs auxquelles les musulmans d'Europe seraient tenus de s'intégrer.
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