S'il est un courant de pensée toujours très vif en
France, c'est bien l'antiaméricanisme. Plus ou moins latent, notre
antiaméricanisme traditionnel s'en donne à coeur joie lors de l'élection
présidentielle américaine. Il y a quatre ans cependant, la victoire de
Barack Obama semblait l'avoir fait disparaître mais l'état de grâce
n'eut qu'un temps.
Ce qu'on a appelé "l'obamania" fit du nouveau président l'icône d'une
Amérique que l'Europe pourrait aimer de nouveau. Mais, cette année,
crise oblige, Barack Obama est redevenu humain, leader d'une puissance
vacillante, économiquement affaiblie et divisée. Adieu les rêves,
bonjour la réalité !
La réalité d'un monde où la montée en puissance des pays émergents,
l'instabilité géopolitique et une crise financière d'une gravité
exceptionnelle bouleversent la donne. Les Etats-Unis furent la première
victime de cette crise.
En octobre 2009, le taux de chômage y était monté à 10 % de la
population active, le plus haut depuis 1981. Depuis, il n'a cessé de
diminuer pour atteindre 8,2 %, son plus bas niveau depuis avril 2009. Si
cette embellie est à porter au crédit du président Barack Obama, on
peut s'interroger sur le coût des moyens mis en oeuvre. Un plan de
relance de 831 milliards de dollars (642,9 milliards d'euros) pour un
pays qui a déjà une dette de 16 000 milliards de dollars, soit 107 % de
son PIB, était-il raisonnable ?
Malgré cet effort, les thuriféraires de la dépense publique n'en
furent pas satisfaits, comme le très keynésien Prix Nobel d'économie,
Paul Krugman. Christina Romer, ex-présidente du conseil économique de la
Maison Blanche, voulait, elle, en porter
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le montant à 1 800 milliards
de dollars.
Solution à la crise
Attaché à la notion de responsabilité, il m'est impossible de
souscrire à ce qui en est la négation, à savoir la dépense illimitée
dans un contexte de ressources limitées. Et si
"en politique, l'absurdité n'est pas un obstacle",
comme l'écrivait Napoléon, les réalités budgétaires constitueront
toujours des écueils sur lesquels s'échoueront les navires mal pilotés.
Prendre parti dans une élection étrangère depuis Paris n'a pas
beaucoup de sens, mais je souhaite mettre en garde contre toute
caricature de Mitt Romney et de son colistier, Paul Ryan, libéraux
américains fidèles à leurs valeurs, que l'on ne peut juger à l'aune de
nos critères européens si l'on souhaite les comprendre.
Républicain ou démocrate, le prochain président devra être celui qui
récréera les conditions d'une économie prospère, car nous avons besoin
d'une Amérique forte. A eux seuls, les Etats-Unis représentent 20 % du
PIB mondial et un tiers des exportations et importations globales. Ils
sont, hors Union européenne, le premier "client" de la France (22
milliards d'exportations françaises). Et les échanges euro-américains
demeurent le moteur de l'économie mondiale, avec 610 milliards d'euros
auxquels il faut ajouter les investissements directs de part et d'autre
de l'Atlantique (près de 1 300 milliards d'euros), sans oublier les
quinze millions de personnes employées par des sociétés européennes aux
Etats-Unis et américaines en Europe.
C'est ensemble qu'Américains et Européens trouveront une solution à
la crise, car nous sommes frappés des mêmes maux : hausse de la dette,
fragilisation de l'économie et du lien social, réponses politiques
inadaptées. La solution pourrait être la création d'une véritable zone
de libre-échange regroupant l'Union européenne et les Etats-Unis, voire
l'Accord de libre-échange nord-américain (Alena). Ce projet consisterait
à tenter une synthèse de ce que chacun a de meilleur : la capacité
d'innovation américaine alliée à celle des Etats européens d'offrir à
leurs citoyens des conditions de vie et de développement personnel de
très grande qualité.
Un subtil dosage entre le dynamisme américain et l'humanisme
européen. Nous avons besoin de la capacité américaine de tirer vers le
haut les économies du reste de la planète. A nous ensuite de nous
adapter pour profiter de ce nouveau cercle vertueux !