In France, there is an awful economic and social climate
says one French expatriate to
Elise Vincent as the Le Monde writer publishes a full-page article on the economic crisis leading to 1.6 million Frenchmen living abroad, most of them under 40 and with a good education (five years of studies above the high school diploma), and as the newspaper of reference publishes an editorial,
François Hollande's Forgotten Promise to the young.
Solenne a le profil classique des 1,6 million de Français qui vivent
aujourd'hui à l'étranger. Comme la plupart d'entre eux, elle a moins de
40 ans et elle est qualifiée (bac + 5). C'est ce profil qui alimente le
plus l'émigration . En février, une étude du cabinet Deloitte – l'un des
plus grands cabinet d'audit et de conseil – a révélé que 27 % des
jeunes diplômés voulaient travailler hors de France, contre 15 % en
2012.
Pour autant, les experts ne parlent pas encore d'émigration massive.
Plutôt d'un frémissement. Contrairement aux idées reçues, pour Solenne
comme pour beaucoup de ceux partis avant elle, la morosité du marché
français n'est pas la principale raison de départ. "Est-ce que je serais restée s'il avait été plus facile de changer de boulot en France ? Non", assure-t-elle. Solenne rêvait d'ailleurs de toute façon. Mais elle concède : sans la crise "sans doute que j'aurais réfléchi autrement"...
"ON NE SAIT PAS SI ON REVIENDRA"
Avant de se décider à tenter sa chance au Canada, Solenne occupait un
poste de chargée de communication à l'Institut français. A Montréal,
elle sera propulsée directrice de la communication d'un centre de danse.
Son salaire y gagnera. Elle aura des horaires plus tranquilles et
pourra se loger dans une jolie maisonnette au lieu d'un T3. Son
compagnon, ingénieur à la RATP il y a encore trois mois, l'y attend
déjà.
\Avec un départ prévu le 5 août direction la Chine, Raphaëlle,
urbaniste, et son conjoint, instituteur, sont dans la même situation.
Avec les mêmes stress liés au largage des ultimes attaches affectives et
administratives : dire au revoir à la famille, aux copains, trouver à
qui louer leur T2 bis sur leboncoin.fr. Seule différence, ce couple de
Parisiens se lance dans l'aventure avec leur petite fille âgée de 2 ans
et demi.
"On ne sait pas si on reviendra", lâche d'emblée Raphaëlle,
32 ans. Son conjoint a trouvé un poste dans une école franco-chinoise
dans le centre de Shanghaï. Elle pense trouver à monnayer d'une façon ou
d'une autre ses services d'urbaniste. Là encore, les effets de la crise
ont pu être un "accélérateur", pense Raphaëlle, mais le couple
avait dans tous les cas des prédispositions à l'expatriation : ils ont
passé respectivement cinq et quinze ans de leur enfance à l'étranger.
LES PAYS ARABOPHONES À FORTE CROISSANCE
Effet de génération ? La fragilité de l'économie française est par
contre clairement un moteur chez Nadia et Reda, fraîchement diplômés de
leur école de commerce. Agés de 23 ans et 22 ans, ils ont chacun achevé,
le 13 juillet, deux ans en alternance en entreprise : Nadia au service
marketing d'IBM France et Reda dans une start-up spécialisée dans le
développement digital. Pour eux, partir est une évidence. Reda dit même
n'avoir fait "aucune recherche en France".
… Mais l'une des raisons qui poussent Nadia et Reda à aller voir hors
de France pour une durée qu'ils ont du mal à planifier réside aussi dans
les origines marocaines de leurs parents. Même si Reda ne sait pas très
bien où classer ce sentiment dans la hiérarchie de ses motivations à
l'expatriation, prévue d'ici à l'automne, il résume pudiquement : "Il y a en France un climat économique et social nauséabond..." "Une xénophobie et une islamophobie", ajoute-t-il quand on lui demande de préciser.
Son entourage est un peu désarçonné. Les parents de ce jeune homme
d'1 m 80, au bouc et à la moustache soignés, sont agents d'entretien.
Ils sont arrivés en France à l'âge de 12 ans et 27 ans. "Pour eux, c'est forcément un peu bizarre de me voir partir, surtout dans ces régions", avoue Reda qui, bon élève, a aussi fait deux ans de classe préparatoire en lettres au lycée Masséna de Nice. Si ses parents avaient des ambitions pour lui, "c'était plus aux Etats-Unis".