Monday, July 02, 2007

Le Rwanda : "Il faut aider Habyarimana coûte que coûte et endiguer l'influence anglo-saxonne"

Comme tout l'entourage du président Mitterrand, obsédé par la préservation de l'influence française dans la région, le diplomate Bruno Delaye décèle une autre urgence que ces alertes. Dans une note du 15 février 1993, le conseiller Afrique de l'Elysée s'alarme du fait que le FPR est "en mesure de prendre Kigali", bénéficiant entre autres de la "complicité bienveillante du monde anglo-saxon" et d'un "excellent système de propagande qui s'appuie sur les exactions malheureuses commises par les extrémistes hutus".

"Le passé est le passé." Just released, the Élysée's archives on Rwanda give an entirely different version of what has hitherto been the official story of France's presence in the country of a thousand hills. The true reason involves the real problem that bedevils this planet (not the Russians, not the Chinese, not genocide, but: those perfidious Anglo-Saxons!).
"Il est patent que, tout au long de la période allant de 1993 jusqu'à l'attentat du 6 avril 1994 [contre l'avion du président rwandais Juvénal Habyarimana], la préoccupation centrale des autorités françaises est de soutenir inconditionnellement le président Habyarimana, même s'il fallait aller au-delà d'un appui indirect aux forces armées rwandaises", écrit Antoine Comte.

…L'Etat français ne semble pas disposé à favoriser les investigations en cours. Le 13 février 2006, la juge Brigitte Reynaud, qui a précédé Florence Michon au TAP, avait signé une commission rogatoire internationale à destination du Rwanda. Elle demandait aux autorités de Kigali de lui fournir tous documents ou auditions "permettant d'identifier les régiments et services français présents au Rwanda en 1994" et d'autoriser une mission sur place des policiers français. Pendant six mois, cette commission rogatoire est restée dans un tiroir du Quai d'Orsay, chargé de l'envoi. Le 24 novembre 2006, le Rwanda a rompu ses relations diplomatiques avec la France…
"Le passé est le passé." Officially, France had no inkling of what type of tragedy was being prepared.
C'est faux. A partir de la fin de l'année 1990, plus de trois ans avant le déclenchement du génocide, l'Elysée avait reçu des signaux d'alerte diplomatiques et militaires.

Des signaux aussitôt négligés, au nom d'une vision conservatrice façonnée par l'histoire coloniale de la politique africaine de la France. La preuve en est fournie par plusieurs volumes d'archives de l'Elysée transmis au tribunal aux armées, dont Le Monde a eu connaissance.

Ces archives dessinent bien une France "mithridatisée" à son sommet, c'est-à-dire accoutumée volontairement au poison, selon le mot de la mission parlementaire réunie en 1998.

Elles répondent à deux questions-clés : Que savait la France des préparatifs de l'entreprise génocidaire ? Quelle était la nature de la coopération militaire décidée par l'Elysée ?

…autour de François Mitterrand, dans ce palais hermétique, on veut défendre une autre perspective et justifier, à tout prix, la politique française. Le 3 mars, pour renverser les charges, le général Quesnot propose au président d'incriminer la rébellion en exigeant "une réorientation forte et immédiate de l'information des médias [français] sur notre politique au Rwanda en rappelant notamment (…) les graves atteintes aux droits de l'homme du FPR : massacres systématiques de civils, purification ethnique, déplacement de population…".

…La pression diplomatique monte, face à l'ampleur des massacres. Les ONG mettent en cause la France. Le 19 juin, l'Elysée publie même un communiqué exceptionnel, pour dénoncer les "procès sommaires" qui lui sont faits. Les médias n'auraient rien compris : la France serait au contraire à louer pour son engagement.

L'opération humanitaire "Turquoise" est lancée; elle va durer jusqu'au 22 août. "Toute cette mission doit être présentée comme une étape nouvelle de notre politique : le passé est le passé", écrit Bruno Delaye le 21juin.

"Le passé est le passé." What is the most important lesson to take from this? As it happens, it has little to do with Rwanda proper. As I explain in my book, the lesson has to do with the Old World's perennial tendency to put off the investigation of bad news (and crimes and/or criminal negligence) until years (or decades) later, allowing for a culture that always feels confident to cover itself with self-praise, in the process blasting Uncle Sam for every known sin imaginable ("we have known war", it is said in a tragic voice, "and that is why we are opposed to your presence in Iraq", conveniently ignoring — until years later — things such as the — far worse — Rwanda tragedy).

"Le passé est le passé." Of course, once (years, decades, later) the tragedy does become public, relatively little is made of it. Why? Because the Europeans are "now" busier with more important fare. I.e., pointing out, investigating, decrying (volubly), and countering the very latest horrendous sin(s) from America's shores (and contrasting said sins with Europe's far more civilized bahaviour/ideology/human interactions)!!

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